La clause de réserve de propriété; les points à vérifier pour qu’elle soit efficace

Il faut prévoir une clause de réserve de propriété dans les documents commerciaux

La clause de réserve de propriété permet au vendeur de revendiquer la propriété du bien vendu et non encore payé  en cas de règlement judiciaire. Les entreprises qui vendent avec cette clause se sentent protégés des impayés. Dans les CGV qui ont été signées par le client il est stipulé que la marchandise non payée est toujours leur propriété.

La clause de réserve de propriété déroge à l’article du (code civil article 1583) “la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé”. Elle permet au vendeur de conserver la propriété du bien vendu jusqu’au paiement intégral du prix.

 

La clause de réserve de propriété, une clause écrite et porté à la connaissance de l’acheteur… au plus tard au moment de la livraison

 

Insérer cette clause au recto de vos factures n’est pas suffisant (même au bout de 79 livraisons en 6 mois). En effet une facture arrive après la livraison. La Loi dispose que la clause de réserve doit être portée à la connaissance du client au moment de la commande. Donc, elle doit être écrite sur l’accusé de réception d’une commande, sur un devis. Elle doit apparaître en caractère visible (donc en gras, en gros et au recto) sur les conditions générales de ventes signées.

 

Il faut prouver que le client accepte cette dérogation.

Donc mention obligatoire “lu est approuvé” + signature + tampon au recto et au verso. Obligatoirement c’est le dirigeant qui signe, pas un salarié sauf s’il a un pouvoir.  Mais il peut la refuser. Il lui suffit de  en rayer la mention et en ajoutant son paraphe en marge. il peut aussi substituer à vos CGV ses Conditions Générales d’Achat (CGA).

 

La clause de réserve de propriété s’adresse à des entreprises qui vendent des biens identifiables.

Il s’agit de biens que l’on peut identifier par une marque, un modèle, un numéro de série, une plaque de propriété sur le bien ET sur la facture. Si vous vendez des boulons vous ne pouvez pas prouver que la marchandise est la votre. C’est théoriquement possible de se faire restituer des biens de mêmes nature (biens fongibles comme le carburant, du riz, du blé, des pommes etc …) mais il y a peu de biens réellement fongibles.

L’inventaire est dressé par un commissaire-priseur, un huissier, un notaire, ou un courtier en marchandises assermenté, désigné par le jugement d’ouverture. L’inventaire protège les actifs de l’entreprise , il protège donc le débiteur. Il ne protège pas le créancier. En conséquence il est généralement vite fait et vague. Ne comptez pas sur l’inventaire pour vous aider.

 

La clause de réserve de propriété ne fonctionne que si le bien ou la marchandise est toujours dans l’entrepôt du client.

L’inventaire est fait dans un délai de huit jours à compter du jugement d’ouverture. En huit jours il en passe de l’eau sous les ponts. La marchandise (ou le bien) peut avoir été volée (c’est fréquent), ne doit pas avoir été fixée au sol, revendue, incorporée dans un ensemble ou posée. Il est théoriquement possible de récupérer le bien incorporé dans un ensemble si on peut les séparer “sans dommages”. Si le bien a été vendu et que le client est de bonne foi, c’est perdu. Entre le moment de l’inventaire et du règlement judiciaire, il se passe plusieurs jours.

 

Conseil

Pour retrouver la marchandise que vous avez vendue la veille vous avez intérêt à vous présenter, avec un huissier chez votre client. L’huissier pourra constater que la marchandise est toujours chez lui. Mais, votre client peut refuser de vous ouvrir. Si vous pénétrez dans l’entreprise pour vérifier c’est une violation de domicile. Si vous la récupérez, c’est du vol donc votre débiteur peut porter plainte et vous serez condamné au pénal.

La marchandise doit être parfaitement identifiable et être parfaitement identifiée dans les documents commerciaux.

La clause de réserve de propriété n’est pas évidente à mettre en oeuvre. C’est donc une fausse sécurité car elle est souvent refusée pour un détail comme une désignation incomplète. Un inventaire “flou” ou une facture ou le bien n’est pas parfaitement identifié dans la désignation et c’est perdu (cass. com. 14 avril 1992, n° 90-1489).

 

Exemple d’une revendication de marchandises refusée :

Pour gagner du temps il n’y avait aucune désignation sur la facture, seulement des références. Sur l’inventaire du représentant des créanciers il y avait : X bidons d’encre jaune, Y bidons d’encre verte, etc. C’est PERDU. Le fournisseur aurait dû spécifier qu’il s’agissait d’encres et les couleurs en plus des références. Je me répète mais ne comptez pas sur l’inventaire pour vous aider. L’inventaire protège le débiteur … et vous êtes le créancier. Elle est aussi perdue même si vous êtes fournisseur exclusif (cass. com. 23 octobre 1990, n° 89-13486).

 

En conclusion.

Il faut avoir la clause de réserve de propriété, mais faites comme si vous ne l’avez pas. 

En effet, vous ne pouvez pas compter dessus pour vous protéger d’un impayé.